[Bâtiment] Le Bastion des Arts

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

-Ce n'est point son domaine : ce dernier est loin, très loin d'ici.
-Mais elle a perçu votre présence et nous a dépêches pour vous demander d'attendre et pour veiller sur vous.
-Vous pouvez vous promener si vous le désirez : nous nous efforcerons de vous protéger des dangers qui rôdent. Mais il ne faudra pas trop vous éloigner de ce sanctuaire, car c'est ici qu'elle se manifestera à vous.

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

Silmandel poursuivit la discussion, cherchant à obtenir des informations sur la maîtresse des fées ou sur Féérie en général. Les deux sujets l’intéressaient réellement, aussi n’avait-il pas à feindre sa curiosité. Il n’oubliait pas de traduire ou de résumer en commun pour qu’Alexandre puisse comprendre quelque chose, voir qu’il participe. Après le bavardage, ils se baladeraient sans doute dans les environs, de quoi occuper une ou deux heures. Après, il verrait bien. Il était loin de pouvoir tout prévoir, surtout pas avec des fées dans un plan étranger.

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

Peu dissertes sur leur maîtresse, les fées parlèrent plus volontiers de Féérie, confirmant qu'il s'agissait d'un plan miroir du monde matériel et qu'il existait entre eux des passages, certains permanents, d'autres éphémères ou intermittents. Elles ne manquèrent pas non plus de souligner la dangerosité de ces lieux enchanteurs : on y trouvait des êtres malintentionnés, à commencer par des guenaudes. Bref, il valait mieux être prudent.
-Nous ferez-vous une faveur ? demanda tout à coup l'une d'entre elles alors qu'ils n'avaient toujours pas quitté les abords de la source.
-Vous métamorphoserez-vous pour nous ? Les êtres comme vous sont rares !
-Des loups-garous, des ours-garous, des tigre-garous, il arrive d'en croiser. Mais des chats-garous... Je ne suis pas certaine que cela me soit déjà arrivé !

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

Silmandel considéra un instant la demande. Les fées lui avaient fait bonne impression jusqu’à présent. Elles lui donnaient de précieuses informations dont il faudrait vérifier la véracité mais qui ne paraissaient pas être des mensonges, elles n’avaient rien tenté de dangereux à leur encontre... bref, elles semblaient jouer franc jeu.
« Pour vous... je veux bien », répondit-il finalement.
Il avertit Alexandre que les fées voulaient voir à quoi ressemblait un chat-garou pour qu’il ne soit pas surpris, puis il adopta sa forme hybride. Étant assis, le changement de taille fut sans doute un peu moins flagrant, bien qu’il soit clair que ses affaires ne lui allaient plus. Il demeura ainsi, sans faire un geste pour achever de se dévêtir, ne montrant guère plus que sa tête et un soupçon de torse par son col béant.
« Voilà », déclara-t-il en elfique, une lueur de malice passant dans ses yeux.
Bien sûr, il ne tenait pas à vexer, il était disposer à se montrer tout entier, mais aussi sérieux qu’il voulait rester, un rien de taquinerie lui faisait du bien.

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

-Charmant, absolument charmant. Mais quel dommage que vous soyez à ce point timide !
-Cela doit être un trait commun aux êtres de votre monde. Cela expliquerait que ni vous ni votre jeune compagnon n'ayez profité de la source.
-Mais peut-être accepterez-vous de vous montrer sous votre forme de matou ?

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

Silmandel eut un sourire félin et ne répondit rien. Au lieu de cela, il se concentra pour devenir chat véritable. Cela eut pour effet de le cacher à la vue des fées, disparaissant sous sa tunique. Il demeura ainsi quelques secondes, comme pour leur faire croire qu’il en resterait là. Puis il se décida à sortir, lentement, souplement, mettant un point d’honneur à déranger le moins possible ses affaires. Une fois libre, il s’étira, fit quelques pas, avant de redevenir hybride, de se lever et de croiser les bras.
« Voilà mesdames. »

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

-Et qu'est-ce qui vous fait penser que nous sommes des dames ?
-Que nous le sommes toutes, du moins ?
-Le fait que le mot "fée" soit féminin dans de nombreuses langues n'est pas très significatif...
Elles rirent.
-Mais vous êtes charmant, indéniablement.
-Et moins timide que nous ne le croyions.
-Tant mieux, les timides sont ennuyeux.

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

« Ho, mille pardons pour cette méprise. Le terme m’a effectivement induis en erreur. Je voulais donc dire : voilà mesdames et messieurs ! »
Il s’inclina, comme à la fin d’un spectacle. Il se tourna ensuite vers ses affaires, puis vers Alexandre, avant de lui demander :
« Que veux-tu faire, à présent ? Ces fées ont l’air bienveillantes et puisque nous devons effectivement attendre, autant que ce soit de façon agréable. Le temps ne passera que plus vite. Alors, balade, baignade, autre chose ? »

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

-La baignade, ça me tente pas des masses. Et la promenade... Comme ça serait trop risqué de beaucoup s'éloigner, je suis pas sûr qu'on trouvera des coins plus chouettes que ceux qu'on a déjà vus. D'un autre côté, quitte à être en Féérie, ça serait bête de pas en profiter au moins un peu. C'est pas comme si ça arrivait tous les jours.
Son expression sérieuse fut atténué par un demi-sourire.
-Après, tu peux aussi continuer ton spectacle pour les fées : ça a l'air de bien leur plaire.

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

« Je pourrais, oui, mais ce n’est pas ça qui va occuper les heures que nous avons devant nous. Il nous faut donc trouver une source de distraction. Ho, je sais ! »
Il venait de claquer des doigts sous l’impulsion d’une idée soudaine. De nouveau, une lueur de malice passa dans ses yeux verts. Il se tourna vers la source et s’exprima en elfique :
« Très chers fées, nous cherchons une façon de nous amuser. Auriez-vous des suggestions ? »
Alexandre avait raison, ce serait bête de ne pas profiter de ce séjour. Il suffisait de partir du principe que la maîtresse des fées était aussi bienveillante que ces sujets, qu’elle leur offrirait donc un moyen de partir rapidement pour se dire que le spectacle n’était pas en péril. De surcroit, ne serait-ce pas une très bonne raison de retour que ce spectacle aux yeux des fées ? Ne pourrait-ils d’ailleurs pas profiter de ce séjour pour améliorer le spectacle d’une façon ou d’une autre ? Le contretemps pouvait devenir atout et avec cet état d’esprit, Silmandel se sentit plus léger. Il retrouvait son optimiste naturel.

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

Les fées rirent joyeusement.
-Êtes-vous à ce point habitués aux villes que vous ne sachiez plus comment vous occuper en pleine nature ?
-Ou votre monde est-il devenu si ennuyeux que l'amusement en est banni ?
-Ce serait bien triste. Bien triste, vraiment.
-Pourquoi ne plongez-vous pas dans la source pour nager un moment ou découvrir ce qui se trouve au fond ?
-Pourquoi ne grimpez-vous pas dans les arbres pour voir qui va le plus haut et profiter du paysage ?
-Pourquoi ne jouez-vous pas à cache-cache, à colin-maillard, au loup ?
-Vraiment, les idées ne manquent pas !
-Nous pouvons même jouer avec vous, si vous le désirez.
-D'autant que cela faisait bien longtemps que nous n'avions croisé de visiteurs !

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

L’une des propositions des fées piqua la curiosité de Silmandel. Il s’approcha de la source et regarda ce qu’il y avait au fond. L’eau était limpide, il ne semblait pas y avoir de mystère. Et pourtant...
« Notre monde est... disons, parfois trop sérieux. On en oublie effectivement bien des choses simples de la vie », dit-il, le regard toujours rivé sur l’eau.
Il plongea. Mystère ou pas, cela faisait longtemps qu’il n’avait pu nager. C’était même la toute première fois qu’il nageait sous cette forme féline. Il prit donc bien soins de s’imprégner du moment.
« Alexandre, tu devrais piquer une tête ! Tu ne le regrettera pas ! »

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

-Hum, je vais plutôt rester pour surveiller tes affaires. Ce serait bête qu'elles disparaissent, non ? D'autant que les fées sont connues pour être facétieuses...
Quoi qu'il en soit, le bassin était d'une fraicheur agréable et d'une profondeur amplement suffisante pour qu'on puisse y nager à loisir. Quant à son fond, il semblait de prime abord ne rien receler d'extraordinaire. Toutefois, à bien y regarder, on percevait de curieux reflets, d'étranges irisations.

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

« À ta guise ! »
Cela l’ennuyait un peu d’être le seul à profiter de la source. Les rôles auraient presque dû être inversés, l’adulte en sentinelle, l’enfant qui se distrayait. Il se dit que les vraies sentinelles, c’était les fées et il se souvint que le garçon n’aimait pas l’eau. De quoi ne pas culpabiliser. Malgré tout, il ne s’attarderait pas trop. Ayant repéré les reflets, il décida d’en avoir le cœur net et nagea jusqu’au fond pour fouiller et examiner.

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

Au premier regard, le fond du bassin se composait uniquement de sable et de galets. Mais pour qui était attentif, il était un peu plus intéressant que cela. En premier lieu, il semblait bien que le sable aurait fait la joie d'un orpailleur, car on voyait briller, parmi ses grains, des éclats dorés. Mieux encore, de belles pierres colorées se mêlaient aux galets. S'agissait-il de gemmes ?
En remontant à la surface pour reprendre sa respiration, Silmandel découvrit qu'il y avait de l'animation sur la berge.
-...désolé, je ne comprends rien à ce que vous... commençait Alexandre, avant de s'interrompre pour lâcher ce qui ressemblait à moitié à un cri, à moitié à un éclat de rire. Hé ! C'est pas loyal, ça !
Manifestement, les fées avaient entrepris de le dérider.

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

Silmandel observa la scène, amusé. Il décida très vite de ne pas intervenir, histoire de voir où ceci allait mener. Dans sa main se trouvait une jolie gemme étincelante. Il se mit à la détailler, à la manipuler, avant de l’abandonner dans la source. Loin de lui l’idée de piller le fond de cet endroit magique pour s’enrichir. Son attention revint sur Alexandre et les fées. Il nageait en attendant.

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

Ce faisant, Silmandel eut confirmation que les fées, par leurs facéties, cherchaient seulement à alléger l'humeur de son acolyte : leurs taquineries n'avaient rien de méchant et si Alexandre sortit essoufflé et débraillé de leurs assauts, il avait la mine moins tendue, moins renfrognée. S'ensuivirent des tentatives de communication, le garçon parlant à mi-voix et faisant de grands gestes, ses invisibles interlocuteurs répondant par des mots et de charmantes lueurs. Parvenaient-ils à se comprendre et si oui, de quoi discutaient-ils ? L'elfe n'en avait pas la moindre idée.

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

C’était parfait ! Silmandel aurait trouvé très dommage qu’Alexandre ne profite pas de ce moment. Et quoi de mieux que des fées pour dérider ? Il observa le garçon et les lueurs, finissant par se demander à quoi allait mener cette séance de communication probablement hasardeuse. Le chat-garou finit par rejoindre le bord de la source. Il demeura dans l’eau mais s’accouda dans l’herbe avec une désinvolture toute féline.
« Alors, vous vous amusez bien ? »
Il demandait à l’enfant.

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

Alexandre prit un air outré.
-On ne s'amuse pas, on travaille.
Il afficha un sourire en coin et fit un geste en direction de la source.
-Mais retourne donc nager. Je te dirai quand il sera l'heure de sortir de l'eau.

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

« Ho ? »
L’instant d’après, Silmandel bondissait hors de la source. Il prit un malin plaisir à s’ébrouer, espérant bien que quelques gouttes atteindraient le garçon, puis il s’avança, toujours quelque peu ruisselant.
« Travailler sur quoi ? » demanda-t-il.
Il parût songeur et ajouta :
« En parlant de travail, il va falloir songer à ta leçon de magie ! »

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

-C'est gentil mais... je pense que ça peut attendre demain. En plus, les fées m'apprennent plein de choses ! Ce serait dommage de ne pas en profiter, non ?
Il lui sourit, mutin.
-Allez, profite donc de la source ! Apparemment, il y a plein de trucs intéressants au fond : de l'or, des gemmes mais... pas seulement ! Tu me montreras tes trouvailles tout à l'heure !

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

Silmandel afficha une franche surprise. Comment Alexandre pouvait-il savoir cela ? Il pensait qu’il était le seul à pouvoir communiquer avec les fées, ces dernières devant ignorer le commun. Il s’exprima en elfique pour en avoir le cœur net :
« Mesdames et Messieurs, dans quelle activité avez-vous donc entrainé mon jeune ami ? C’est que... je suis responsable de lui. »
Il voulait savoir. Tout comme il voulait savoir ce que pouvait encore cacher le fond de la source. Chaque chose en son temps.

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

-Comme il semblait d'humeur chagrine, nous nous sommes dit que nous allions le distraire.
-Et comme il ne semblait guère désireux de bouger dans l'immédiat, nous avons commencé par tenter de communiquer.
-Nous y parvenons de mieux en mieux mais, si cela vous dérange, nous pouvons arrêter.

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

« Ho, et bien non, c’est très bien comme ça. Je m’en voudrais s’il ne gardait pas de notre excursion un bon souvenir. »
Silmandel ne pouvait effectivement pas être le seul à s’amuser. Il s’écarta d’un pas, regarda la source puis décida d’élucider un mystère de plus. Si le fond de cette source cachait quelque chose, il allait le trouver, foi de chat-garou !

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

Il replongea donc dans l'eau pour examiner le fond du batin. Mais, au bout de plusieurs minutes, il n'y avait toujours rien remarqué de nouveau : seulement du sable, des galets et, de-ci, de-là, des gemmes ou des pépites d'or.
Sur la berge, Alexandre avait tiré de sous sa tunique la médaille qu'il portait autour du cou. Sans doute la montrait-il aux fées dont de fugaces lueurs colorées attestaient la présence...

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

Silmandel, à chaque fois qu’il remontait prendre sa respiration, jetait un coup d’œil à Alexandre et aux fées. Le garçon semblait bien s’amuser. Et puisque lui-même était occupé, il se dit que tout était parfait. Il persista dans ses recherches, étant quand même du genre persévérant. S’il le fallait, il creuserait. Dans le pire des cas, il finirait par se trouver une jolie gemme qu’il pourrait peut-être garder en souvenir de ce moment tout de même particulier. Son premier voyage dans un autre plan... et quel plan !

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

Il dut finalement creuser. Ou, plutôt, déblayer.
Après avoir ramassé une gemme particulièrement belle, il nota un étrange reflet à l'endroit précis où il l'avait retirée du fond du bassin. Ayant écarté une certaine quantité de sable, il se rendit compte que celui-ci recouvrait un objet brillant, un objet de bonne taille qu'il entreprit de dégager complètement. Cela réclama du temps et des efforts mais, au final, l'elfe dégagea une large surface plane et circulaire dont il ne parvint pas à déterminer la matière : s'agissait-il d'une pierre polie, d'un cristal, d'un imposant morceau de verre ? Toujours est-il qu'elle avait des propriétés réfléchissantes, du moins semblait-il, car à sa surface apparaissait un firmament d'azur similaire à celui qui dominait la source. En revanche, le reflet de Silmandel se limitait à une ombre ténue, translucide, à peine perceptible...

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

Décidément, cet endroit ne semblait pas avoir de limite en matière de merveilles ! Intrigué, enthousiaste, Silmandel n’en oublia pas pour autant de continuer de surveiller Alexandre et les fées chaque fois qu’il remontait. Cependant, à chaque plongée, il restait autant que le lui permettaient ses poumons. Il entreprit de dégager aussi largement que possible la chose au fond de la source. Pouvait-il la ramener à la surface ? Trouverait-il quelque part une inscription, un indice quelconque sur sa nature ou son usage ? Une chose était certaine, il n’allait pas ménager ses efforts. Cela avait de plus l’avantage de l’habituer à sa forme hybride. Il l’aimait bien, se sentait bien avec et trouvait qu’elle était particulièrement adaptée à ce plan féérique.

[Taliesin]

[Interlude : Ailleurs]

Cette fois cependant, ses efforts furent vains. S'il réussit à dégager l'entièreté de l'objet, il apparut vite qu'il était impossible de le désolidariser du fond du bassin et que, même si cela avait été envisageable, son poids et sa taille auraient empêché tout déplacement. Quant à des inscriptions ou à des indices, il n'y en avait pas la moindre trace. Bref, l'étrange mirroir demeurait un complet mystère.
Pendant ce temps, sur la berge, Alexandre continuait ses échanges avec les fées et ne paraissait pas du tout s'ennuyer.

[Manfred]

[Interlude : Ailleurs]

De retour à la surface, Silmandel s’accouda comme il l’avait déjà fait au rebord de la source, la tête dans les mains, avec une posture nonchalante fort appropriée à sa féline apparence. Il observa un instant Alexandre puis se décida à interroger les fées, ce qu’il fit bien sûr en elfique.
« Savez-vous à quoi sert le miroir au fond de la source ? C’est qu’il m’intrigue. Son reflet est curieux. »
Il ne voyait aucune raison pour aborder une approche moins direct.