[Bâtiment] Domaine de Hautetour

[Taliesin]

Parangon de morgue et maître en l'art de la mauvaise foi, Godefrey n'en était pas pour autant idiot. Il dut donc s'en rendre compte. Toutefois, il fit mine de ne pas le remarquer ou de n'en avoir cure. Avec un certain succès, il fallait l'admettre...
Quant à Jean, si ses premières manœuvres de diversion ciblèrent équitablement les deux protagonistes, un regard noir - sinon assassin - du jeune sieur de Valombre le dissuada instantanément de poursuivre sur cette voie. Aussi ses initiatives suivantes se concentrèrent-elles exclusivement sur "Gail".

[Claris de Corvimande]

Les réactions respectives de Godefrey, puis de Jean, n'avaient rien de particulièrement surprenant. En fait, le jeune homme avait sans doute mené sa tâche à bien plus longtemps que ce à quoi Claris aurait pu s'attendre. À défaut d'apprendre véritablement au jeune Valombre à ne pas se laisser bêtement distraire, les quelques passes d'armes qui suivirent purent au moins lui montrer que des combattants plus entraînés que lui résistait bien mieux à ce genre de choses. Restait à savoir ce qu'il en retiendrait, et, pour ça également, il serait sans doute très doué pour faire mine de rien…

L'exercice terminé, Claris salua de manière très protocolaire, puis,

« Bien. Vous allez maintenant reprendre le combat l'un contre l'autre, et je vais, cette fois-ci, véritablement chercher à vous empêcher de prendre le dessus. À vous de faire en sorte d'y parvenir quand même. Naturellement, si vous désirez des conseils de ma part, n'hésitez pas à demander, maintenant ou en cours de route. »

[Taliesin]

Godefrey eut un acquiescement à peine perceptible. Puis il se mit en garde.
Il semblait ne pas s'inquiéter le moins du monde pour la suite des événements, au point qu'il était permis de se demander s'il n'avait pas déjà sa petite idée en tête... Hypothèse qui ne fut pas longue à se confirmer. En effet, après quelques passes d'armes ordinaires, il dévia brutalement la lame de son adversaire, se rua contre lui pour le busculer, le gratifia d'un croc-en-jambes pour le faire choir... Et sitôt que Jean, déconcerté, se retrouva les quatre fers en l'air, le jeune Valombre fit face à Claris, seule menace dont il eut à se préoccuper dans l'immédiat.

[Claris de Corvimande]

Mais la réaction de la menace en question ne fut sans doute pas celle que le jeune homme attendait, puisqu'il s'agit… d'un franc éclat de rire.

« Bien joué. Bien sûr, on pourrait objecter que, pour quelqu'un qui juge que même des sabres sont indignes de lui, user ainsi de ses jambes manque cruellement d'élegance, mais l'essentiel est là : agir vite et mettre ses adversaires hors d'état de nuire avant qu'ils n'aient pu recevoir de renforts. Toutefois, il n'est pas dit que ça puisse marcher aussi bien à tous les coups. Ne serait-ce que parce que, maintenant, votre adversaire s'y attend. »

Qui ce “votre adversaire” désignait-il ? Cela dépendrait de Godefrey : il pouvait juger que la passe d'arme n'était pas terminée et attaquer Claris, qui était toujours en mesure d'apporter du renfort à Jean ; ou bien attendre que ce dernier se relève pour réengager le fer contre lui. Dans un cas comme dans l'autre, l'exercice ne s'achèverait pas aussi rapidement, et tout serait fait pour que la victoire suivante lui soit plus dure à obtenir.

[Taliesin]

Godefrey, cependant, avait une réponse toute trouvée.
-Si nous étions en conditions réelles, il serait déjà mort : j'avais largement le temps de le passer au fil de l'épée. Par conséquent, il est hors jeu. Et si tu considères qeu son retour coïncide avec l'arrivée de renforts ennemis, alors je peux considérer que mes gardes du corps eux aussi arrivent en renfort. Pour un seigneur digne de se nom, ne pas être escorté est un manquement à plus d'un titre.
Pendant ce temps, Jean se relevait. Il semblait en avoir plus qu'assez de subir ce genre de brutalités. Toutefois, ce qui devait encore plus l'agacer, c'était le fait de ne pouvoir ni se plaindre, ni riposter : il avait beau être de sang noble, pareil comportement lui aurait valu à coup sûr de sérieux ennuis.

[Claris de Corvimande]

« En situation réelle, effectivement, vous auriez vaincu et les choses se seraient arrêtées là. Mais il s'agit ici d'un entraînement, et l'entraînement doit se répéter plusieurs fois, car, si bon que vous soyez, c'est le seul moyen de s'assurer que Beshaba ne vous volera pas la victoire au moment crucial. »

Tout en parlant, puisque le jeune Valombre ne semblait pas immédiatement réengager le combat, Claris se dirigea vers Jean et s'assura qu'il se portait bien, s'efforçant, par ses gestes, de contenir une colère bien compréhensible. Il n'était pas envisageable de faire davantage pour l'instant – cela aurait gâché les efforts faits avec l'autre –, mais ils devaient avoir, ensuite, une conversation en tête à tête pour arranger les choses. Qui sait, ce gamin-ci pouvait s'avérer très utile…

[Taliesin]

Toujours aussi soucieux de sauver les apparences, Jean fit comme s'il allait très bien, comme si tout cela ne l'affectait en rien. Quant à Godefrey, il ne put s'empêcher de répliquer avant de se préparer à la nouvelle passe d'armes :
-Un entraînement n'est-il pas plus efficace s'il se rapproche le plus possible de situations réelles ? Et dans ce cas, ce crétin ne devrait-il pas faire comme s'il ignorait totalement la manœuvre surprise dont je me suis si habilement et si opportunément fendu à l'instant ?
Il en alla ainsi tout au long de la séance : certes, il finissait par se plier aux exercices, mais non sans avoir au préalable remis en cause leur bienfondé. Bref, le jeune sieur de Valombre s'efforçait de se mettre dans la position de celui qui sait tout mieux que la personne censée lui apprendre quelque chose mais se pliant à ses exigences en grand seigneur.
Enfin, l'entraînement toucha à son terme.

[Claris de Corvimande]

Inutile, sans doute, de lui expliquer que de nombreux adversaires s'y seraient attendus… “Gail” poursuivit la séance en conservant la même attitude, ni servile, ni provocante, se bornant à avoir la véritable connaissance de son côté. Si, au moins, il travaillait, cela suffisait pour l'instant.
Puisque, cette fois, il ne semblait pas vouloir quitter les lieux en avance – encore heureux, étant donné le retard qu'il avait eu au départ –, Claris mit un point d'honneur à faire en sorte que les choses se terminent à l'instant précis où Antin commençait à bouger pour annoncer la fin de la séance.

Une fois Godefrey repartit, il restait à ramasser les armes pour les ranger… et à attendre de voir si Jean engageait de lui-même la conversation ou s'il fallait l'y inciter.

[Taliesin]

Si Jean, qui commença spontanément à l'aider pour le rangement, lui adressa bel et bien la parole, ce ne fut cependant que pour des questions liées à cette activité. De ce qui s'était passé durant la séance, de ce qu'avait fait Godefrey et de ce qu'il en avait éprouvé, il ne pipa mot. Peut-être était-il du genre à garder ce qu'il ressentait par devers lui. A moins, simplement, qu'il ne soit d'une nature prudente. Or, ne pas trop se livrer était probablement recommandé lorsqu'on évoluait dans pareil environnement.

[Claris de Corvimande]

Rentrer dans le vif du sujet sans la moindre once de subtilité ne l'était sans doute pas davantage. Mais, en manœuvrant bien, Jean pouvait être un précieux allié, y compris pour le réel objectif de Claris – était-ce si rare, après tout, que la meilleure source d'alliance contre un ennemi donné soit cet ennemi lui-même ?
Il fallait donc amener le jeune homme à avoir suffisamment confiance pour dire ce qu'il avait sur le cœur, pour pouvoir ensuite tirer parti de son ressentiment en le guidant dans la direction la plus profitable. Chose à laquelle Reuel et Borealis excellaient tous deux, mais que leur enfant avait bien moins souvent eu l'occasion de pratiquer. Il fallait pourtant bien débuter quelque part…

« Tu t'en es bien sorti. Ce n'était pas facile, mais tu t'en es bien sorti. »

Une légère hésitation, au moment de prononcer le “ce”, laissait flotter dans l'air le fait que la source de cette non-facilité était très facile à identifier.

[Taliesin]

-Merci. C'est gentil, répondit-il d'un ton détaché.
Il se pencha pour récupérer une arme, grimaça légèrement, se massa machinalement les côtes.
-J'imagine que ce genre de séance est formateur, soupira-t-il.
Nouvelle grimace, d'embarras cette fois, comme s'il estimait en avoir trop dit ou d'une façon inappropriée.
-C'est même assurément très formateur, conclut-il d'une voix plus ferme et, à nouveau, relativement détachée.

[Claris de Corvimande]

L'attitude de “Gail” demeura encourageante, laissant entendre, autant que possible, qu'il pouvait parler librement.

« Tu auras bientôt suffisamment progressé pour que ce genre de… désagréments ne survienne plus. Du moins, au cours de nos séances. »

Bien sûr, rien ne le protégeait du fait que le jeune Valombre décide de se venger de ses échecs à un autre moment. S'il craignait ce genre de choses, ce pourrait être une piste pour le conduire à entrer dans le complot. Claris aimait plutôt bien ce gamin, après tout. Peut-être même suffisamment pour, si la mission se concluait par un massacre, le laisser tuer Godefrey à sa place. Ou tout de même pas à ce point.

[Taliesin]

Jean arbora une mine quelque peu résignée.
-Il y a certaines choses dont il vaut mieux s’accommoder, sous peine de s'attirer des désagréments autrement plus désagréables, fit-il.
Il eut un sourire fugace.
-Entre deux maux, il faut choisir le moindre, comme on dit.
L'instant suivant, il se penchait pour ramasser une dernière arme. Puis il se tint immobile, prêt à se mettre en route : le rangement était terminé.

[Claris de Corvimande]

« Il ne faut pour autant pas se résigner trop vite. Il y a plusieurs manières de faire changer les choses… »

Mais aborder trop directement ce genre de choses était risqué et avait peu de chances de donner de bons résultats. Aussi était-il préférable d'aborder la chose d'une autre manière, et ce d'autant plus en revenant vers des zones plus habitées et où, donc, leur conversation risquaient davantage d'être entendue.

« Cela fait longtemps que tu es ici ? »

Bon, ramené à l'âge du gamin, “longtemps” n'avait pas forcément le même sens.

[Taliesin]

Sa première remarque lui avait valu, de la part du gamin, un regard en coin curieux ou perplexe, difficile de savoir exactement. En revanche, sa question obtint une réponse sans ambiguïté.
-Depuis que j'ai sept ans. C'est d'ordinaire à cet âge là que l'on devient page.
Il eut une légères grimace.
-Hum, mes excuse : j'imagine que vous le savez, ça... Mais bref, c'était une chance pour ma famille : c'est un honneur et un signe de confiance que de se voir attribuer une telle charge par son suzerain. Sans cela, je serais devenu page dans la famille de ma mère. Elle est tout ce qu'il y a de plus noble, bien sûr, mais son prestige est forcément moindre que celle de la maison de Valombre.

[Claris de Corvimande]

« J'imagine, oui. »

En réalité, bien sûr, Claris faisait bien plus qu'imaginer ce genre de choses. Mais Gail, d'extraction roturière, ne pouvait être que moins au fait des subtilités des rapports entre les familles nobles, et questionner à ce sujet serait sans doute ce qui semblerait le plus naturel de sa part. D'autant que ce n'était pas dénué d'intérêt : la famille de Jean, sur laquelle ses informations étaient jusqu'alors plus que lacunaires, pouvait s'avérer en position de profiter d'un affaiblissement de celle de leur suzerain, comme les Valombre avaient jadis profité de la chute des Noirelande. Auquel cas cela pourrait peut-être être mis dans la balance pour convaincre le jeune homme de participer.

« …mais je dois avouer que tout ça reste un peu mystérieux pour moi. Tu pourrais me parler de ta famille ? »

[Taliesin]

-Si vous voulez...
Il prit un air pensif, cherchant manifestement quelles informations seraient les plus susceptibles d'intéresser le jeune maître d'armes.
-Le seigneur mon père est baron d'Estemarche, et son domaine s'étend assez loin au nord-est d'ici. Il est l'un des principaux vassaux de la maison comtale de Valombre et est lui-même le suzerain de plusieurs chevaliers fieffés. Enfin, il compte parmi ses ancêtres plusieurs combattants s'étant illustrés sur le champ de bataille, ce pour la gloire de l'empire.

[Claris de Corvimande]

Eh bien, cela ferait sans doute un bon vassal pour la famille de la Noirelande lorsque celle-ci aurait reprit sa digne place. Il faudrait d'ailleurs sous peu trouver le moyen de discuter avec Antin de la suite des événements.

« J'imagine qu'avoir des combattants illustres parmi ses ancêtres doit être une grande source d'inspiration… »

Gail, pour sa part, devait sans doute ignorer beaucoup de choses de ses ancêtres – les familles roturières prêtaient vraisemblablement moins d'importance à la généalogie. Claris, sur ce point, plaignait quelque peu son personnage ; et ce d'autant plus que la famille de Corvimande, contrairement à un grand nombre d'autres, ne s'était pas spécialisée à outrance : elle avait compté d'illustres personnalités dans la plupart des domaines qui seyait aux personnes de leur rang.

« Et pour la famille de ta mère ? »

Puisqu'il venait d'en parler, la question était prévisible. Non pas que la réponse ait de grandes chances d'être d'une importance cruciale ; mais, pour le moins, retourner l'enfant contre ses maîtres actuels nécessiterait sans doute de lui témoigner un intérêt notable.

[Taliesin]

Jean ne se fit pas prier pour répondre, sans doute ravi d'évoquer sa famille.
-Mon grand-père maternel est baron de Gardesol. Ses terres sont situées dans les plaines qui bordent la partie orientale des montagnes de Jahlin et si elles sont prospères, cela est en grande partie dû à la vaillance de ses soldats, qui à maintes reprises ont repoussé les furieux assauts des Peaux-Vertes qui grouillent dans les hauteurs.

[Claris de Corvimande]

Le nom de Gardesol évoquait vaguement quelque chose à Claris ; mais les familles nobles étaient un peu trop nombreuses dans l'empire pour que la plupart d'entre elles représentent plus qu'un simple souvenir d'un nom sur une carte.

Au moins, cela lui fournissait un moyen de revenir à des préoccupations plus immédiates.

« J'imagine que, bien que les honneurs soient moindre, servir là-bas aurait au moins eu l'avantage d'être plus… mouvementé. Il ne doit pas y avoir beaucoup de raisons autres que l'entraînement de manier l'épée, en pleine ville… »

Il y en aurait, bientôt.

[Taliesin]

-Oh, d'après ce que j'ai entendu dire, Melandis est une cité des plus périlleuses. Après, je dois avouer ne guère m'y être promené : je sors rarement d'ici.
Il prit un air philosophe.
-Quant à tirer l'épée... Je ne suis de toute façon pas prêt. J'ai encore beaucoup à apprendre, beaucoup à m'entraîner, et même si c'est parfois ennuyeux, il est important de ne pas mettre la charrue avant les bœufs.

[Claris de Corvimande]

Ce gosse était assez impressionnant. Claris, à son âge, n'aurait jamais conclu sur ce genre de remarque de sa propre initiative. Et même avec quelques années de plus, sa tendance à surestimer ses talents n'avait pas disparu. Mais en avoir conscience devait aider à compenser, non ?

« Très bon état d'esprit. Et même si ça prend effectivement longtemps, tu deviendras un bon combattant. Tu as déjà du talent. Mais je parlais moins de la ville elle-même que de l'intérieur des murs, en fait. Depuis que tu es au service des Valombre, combien de fois a-t-il fallu que les gardes fassent usage de leurs armes pour repousser de véritables intrus ? »

[Taliesin]

-Hum, je ne crois pas que cela se soit produit depuis mon arrivée... J'imagine que les gardes ont, en plus de leur fonction défensive, un but dissuasif...
Il arbora un air pensif.
-Et puis, si les gens se mettaient à attaquer ouvertement les demeures des nobles, cela signifierait que la ville est très mal en point, non ?

[Claris de Corvimande]

« Ouvertement, sans doute. »

De nouveau, Claris laissa en suspend. À mesure qu'ils se rapprochaient du lieu de rangement des armes qu'ils portaient, la probabilité de croiser des oreilles indiscrètes augmentait, aussi mieux valait sans doute aborder le moins possible ce qui risquerait, par la suite, d'attirer l'attention sur leur complot – après tout, il s'agissait d'éviter que tout le monde pense à une attaque extérieure dès les premiers signes. Il était préférable de revenir à l'enfant lui-même.

« Tu as des frères et soeurs ? »

En d'autres termes : qui hériterait des domaines de son père ? Cela pouvait changer ses réactions en cas d'éventuelle implication.

[Taliesin]

-J'ai un petit frère, répondit Jean. Et trois sœurs : l'une plus âgée, les autres plus jeunes.
Il eut un bref soupir.
-Même si je mesure la chance que j'ai d'être ici, ils me manquent : je n'ai pas souvent l'occasion d'aller les voir.
Ils avaient atteint les quartiers de la garde et remontaient le couloir menant à l'arsenal.

[Claris de Corvimande]

« Quel âge a ta sœur aînée ? »

Non pas que ça ait un réel intérêt ; mais il fallait bien laisser parler un peu sa curiosité.

« J'imagine que les plus jeunes doivent pas mal changer d'une visite à l'autre… »

Tu sais, si tu m'aides à régler leur compte aux Valombre, tu pourras retourner les voir plus souvent. Non, ce n'était sans doute pas le meilleur moyen de présenter les choses, surtout ici où des gardes pouvaient être rencontrés à tout moment.

[Taliesin]

Il acquiesça.
-Elle a treize ans. Et oui, ils ont tous beaucoup changé à chaque fois que je vais les voir. Il paraît que c'est également valable pour moi même si, bien sûr, je ne m'en rends pas vraiment compte.
Leur destination atteinte, Jean entreprit de ranger avec soin les différentes armes qu'il avait transportées.

[Claris de Corvimande]

Treize ans ? Une gamine. Et pourtant, c'était sans doute très près de l'âge que pas mal de personnes ici prêtaient à Gail. Assez curieux d'y penser…

Claris aida bien évidemment Jean à cette tâche en continuant de poser quelques questions de routine sur sa famille. L'objectif était moins d'acquérir des informations, peu utiles au demeurant, que de s'assurer la sympathie du jeune homme.
S'il n'avait rien de plus urgent à faire, ils pourraient profiter quelque peu de la salle d'entraînement sitôt que le rangement serait terminé. Ensuite… eh bien, parler avec Antin serait sans doute utile, mais aller le trouver spécifiquement n'était sans doute pas une bonne idée. Si aucune occasion pouvant passer inaperçu ne se présentait, rejoindre la salle de repos serait sans doute le mieux à faire, en attente d'une meilleure idée.

[Taliesin]

Jean accepta volontiers ces nouveaux exercices. Toutefois, il dut bientôt y mettre un terme, expliquant en s'excusant qu'il lui fallait se rafraichir et se changer avant de reprendre sous peu son service.
Claris passa la suite de l'après-midi en compagnie des gardes n'étant pas en faction, à bavarder, à disputer quelques parties de cartes. Elle n'eut pas vraiment d'occasion de s'éclipser et ne vit pas davantage Antin dans les parages, quoique celui-ci ait sans doute également envie de lui parler. Il leur faudrait probablement faire preuve de patience : ils n'étaient ici que depuis peu de temps, tandis que la mission d'infiltration avait d'emblée été prévue comme de longue durée...

[Claris de Corvimande]

Pour parvenir à contacter Antin, il lui fallait d'abord avoir une meilleure idée du rôle qu'il occupait exactement ici et des parties de la demeure qu'il fréquentait lorsqu'il n'était pas en train d'escorter l'un ou l'autre des jeunes Valombre à ses cours. Informations dont il était parfaitement compréhensible qu'une personne arrivée depuis peu ne dispose pas forcément. Claris profita donc des discussions entre et pendant les parties de cartes pour poser quelques questions anodines sur l'organisation des lieux, les différents niveaux de hiérarchie dans la garde, et les personnes recrutées peu avant son arrivée – la fréquence d'arrivée des nouvelles têtes, le temps qu'elles mettaient habituellement à être acceptées et à se sentir à l'aise, ou les missions qu'on leur confiait habituellement lors de leurs arrivées. Rien qui ne soit en mesure d'attirer l'attention, compte tenu de sa position ; mais des informations qui lui seraient assurément très utile. Qui pourraient d'ailleurs l'aider à planifier ses occupations pour la soirée.