[Lieu] Les Rocheuses du Dragon

[Galathée]

Elle commença son dessin mais dut rapidement se rendre à l'évidence : la mémoire humaine était très imparfaite. Elle avait un souvenir vague du tracé général en étoile saccadée autour du lac, elle se souvenait du nombre de branches — neuf — mais pas de leur parcours exact, car aucune d'elle n'était rectiligne ou courbe, toutes partaient en zigzags irréguliers, certaines plus proches que d'autres, parfois se croisant ou s'entrelaçant pour ne plus faire qu'une. Sans compter qu'entre se représenter quelque chose et parvenir à le coucher sur papier, il y avait une marge... importante. La main n'obéissait qu'imparfaitement au souvenir.
Mais elle termina avec quelque chose. Peut-être Kalju parviendrait-il à le croiser avec son propre relevé.
Au dehors, la bise soufflait toujours, le ciel s'était à nouveau couvert. Le temps menaçait de se dégrader mais c'était incertain, vu la vitesse à laquelle se déplaçaient les nuages.

[Voyageuse]

Elle rangea le dessin dans sa poche et contempla le ciel, indécise. Elle avait envie de rentrer au camp, pour aider Kalju, ne serait-ce qu'en lui transmettant ce plan sommaire des lieux. Il l'attendait, il allait s'inquiéter. Mais redescendre était-il vraiment prudent sans un bon équipement, sans corde, sans bottes ? Il était évident que le plus sage était d'attendre le lendemain.
Elle songea qu'elle pouvait s'autoriser une tentative, et rebrousser chemin si cela s'avérait trop hasardeux, puisqu'elle avait désormais un abri pour la nuit. Mais marcher dans la neige signifiait sacrifier sa couverture pour y envelopper ses pieds... et donc ne plus avoir de couverture pour la nuit si elle se trouvait contrainte de renoncer. Sauf si elle réussissait à n'en sacrifier qu'une petite bande.

Avec un soupir, elle revint vers l'éboulis. Elle pouvait aussi vérifier vérifier d'abord s'il n'y avait pas une autre issue, en élargissant l'ouverture. A condition que les rochers soient assez stables pour supporter son poids sans risque d'éboulement... Elle examina donc les rochers, cherchant à les ébranler doucement. Elle ne grimperait là-haut que si elle était suffisamment certaine de la stabilité de l'ensemble. Sinon, elle renoncerait et retournerait tenter sa chance à l'extérieur... en sacrifiant le moins possible de couverture.

[Galathée]

L'éboulis avait l'air relativement récent, les pierres n'avaient pas encore été soudées les unes aux autres par la poussière et les graviers, mais il paraissait néanmoins solide et Astrée put s'élever aisément et en choisissant bien ses prises, grimper sans ébranler le moindre caillou. Elle arriva ainsi à hauteur du trou. Elle ne perçut aucun souffle, aucune lueur, juste les ténèbres et le froid. Il était juste assez grand pour qu'elle y passe la main et sans doute y avait-il moyen de l'agrandir, en travaillant très précautionneusement, rocher par rocher.

HRP : un dé 100 sivouplé.

[Voyageuse]

HRP : 87 (décidément, les dés virtuels, ça me va mieux !)

Astrée hésita. S'il y avait une issue, n'aurait-elle pas dû sentir un souffle d'air ? Si elle ne sentait rien, était-ce parce qu'il n'y avait aucune issue ou simplement parce qu'il y avait trop de circonvolutions entre les deux extrémités ?
Elle n'était pas suffisamment expérimentée dans ce domaine pour trancher. Mais l'éboulis lui paraissait suffisamment stable pour tenter de voir au-delà. Et puis, agir la réchauffait. Elle commença donc, précautionneusement, à ôter quelques pierres. Elle souhaitait juste voir si la galerie se prolongeait au-delà de l'éboulis, et si elle était praticable. Cela lui semblait peu probable, mais elle n'était pas du genre à s'avouer vaincue avant d'avoir essayé.

[Galathée]

HRP : mais tu ne sais pas s'il fallait peu ou beaucoup


Même en dégageant quelques pierres, on n'y voyait pas grand chose de l'autre côté de l'éboulis. Il faisait trop sombre et même avec une flamme à bout de bras, Astrée n'y voyait pas grand chose. Le mur du fond semblait distant, en tout cas trop distant pour que sa lumière l'éclaire, mais de là à savoir si la galerie se prolongeait... Il lui faudrait probablement passer entièrement dans la seconde salle pour pouvoir le déterminer.

[Voyageuse]

Elle se décida, après quelques minutes de tergiversations, à franchir l'étroite ouverture. Elle le fit avec toutes les précautions qu'elle pouvait imaginer, en vérifiant que la voûte était stable, qu'aucun autre éboulement ne menaçait. Se retrouver bloquée de l'autre côté serait une catastrophe.
Elle se souvint que Kalju avait parlé d'instabilité du sous-sol, et faillit renoncer, par prudence. Cependant, elle n'en avait que pour quelques minutes, le temps de vérifier que la grotte au-delà de l'éboulement était bien une impasse. Elle se rassura, en se répétant qu'il était extrêmement peu probable qu'un problème sismique survienne exactement pendant ce court laps de temps. Mais elle ne se sentait vraiment pas très à l'aise sous terre.

[Galathée]

Astrée parvint à passer de l'autre côté sans trop de mal, repoussant quelques pierres qui dégringolèrent de l'éboulement mais sans provoquer de réel effondrement. Elle devina cependant, au son qu'elles firent en heurtant le sol en contrebas, que celui-ci n'était pas complètement rocheux. A la lumière de sa flamme magique, elle constata qu'il n'y avait effectivement pas d'issue : la grotte se prolongeait sur quelques mètres et se terminait par une paroi de roche intacte. Mais elle découvrit aussi les vestiges d'un campement, sommaire, ancien, le long d'un des murs. Une paire de corps encore emballés dans leurs couvertures, allongés sur leur couche, gisaient, complètement morts. Ils avaient été comme momifiés par le temps et le froid, abrités des prédateurs par l'éboulis. Difficile de savoir depuis combien de temps ils étaient là...

[Voyageuse]

Elle ne put réprimer un frisson et rebroussa aussitôt chemin. Non, vraiment, finir ainsi, emmuré sous terre... cette simple idée lui nouait l'estomac et lui hérissait les poils. Elle avait subitement un peu plus froid, et hâte de rejoindre la lumière du jour. Elle escalada l'amoncellement de roches avec mille précautions, plus anxieuse encore qu'à l'aller.
Puis, au moment de franchir l'étroiture, elle songea que peut-être, ces inconnus avaient des bottes... et qu'elle ferait bien de songer à les prendre, même si l'idée d'aller récupérer des objets sur le corps d'un mort ne l'inspirait absolument pas.
Elle surmonta son dégoût en songeant que si elle-même était décédée, elle ne verrait aucun inconvénient à ce qu'un inconnu prenne sur son cadavre des objets dont il aurait besoin. Donc ça ne dérangerait sans doute pas les âmes de ces pauvres défunts si elle prenait juste une paire de bottes : eux-mêmes n'en avaient plus l'utilité, après tout...
Avec une grimace, elle redescendit, et se dirigea vers les cadavres.

[Galathée]

Astrée trouva des bottes et bien plus encore : les deux hommes, s'ils avaient succombé à la montagne, avaient été plutôt bien équipés en matériel adéquat : cordes, pitons, couvertures, vêtements chauds, et bottes, donc. Les deux paires étaient trop grandes pour Astrée, mais en les fourrant, elle parviendrait aisément à les adapter à sa pointure. La nourriture était par contre impropre à la consommation, abandonnée depuis trop longtemps, mais si elle le désirait, elle pouvait reconstituer un paquetage plus adapté au terrain que celui qu'elle avait trimballé jusque là.

[Voyageuse]

Elle récupéra, en plus des bottes, une corde solide et quelques pitons. Elle avait déjà des vêtements chauds et une bonne couverture, et jugeait préférable de ne pas trop se charger pour redescendre. Elle prit simplement un pull supplémentaire, au cas où ses vêtements soient trempés par la neige et qu'elle soit contrainte de bivouaquer. Avoir chaud était vital, et c'était son seul impératif : ses baies magiques la nourriraient et la neige la désaltérerait.
Elle empaqueta le tout dans un sac, y ajouta un bon couteau, et fit demi-tour. Il ne lui restait plus qu'à se glisser par l'étroite ouverture et à ressortir. Elle était désormais équipée pour redescendre sans difficulté.

[Galathée]

Le couteau avait besoin d'une petite séance de pierre à aiguiser — ce qui se trouvait aussi parmi les affaires des malheureux randonneurs*— mais Astrée n'avait probablement ni le temps, ni l'utilité d'y perdre encore une heure. Elle repassa donc de l'autre côté de l'éboulis et retrouva l'air glacé et la lumière aveuglante de la neige. Le ciel était légèrement couvert mais la réverbération du soleil qui perçait au travers des nuages était particulièrement désagréable pour les yeux, surtout en revenant des profondeurs obscures de la grotte. Rien ne semblait s'opposer à ce que la jeune femme reprenne sa descente, cependant, hormis le vent, toujours vif, toujours traître, qui agitait la montagne tantôt dans une direction, tantôt dans l'autre, semblant siffler des chants de chute aux imprudents qui l'arpentaient.

[Voyageuse]

Astrée retrouva la lumière du soleil avec un soulagement indéniable. Elle cligna des yeux quelques instants, se courba légèrement pour résister au vent, et s'efforça de s'orienter de son mieux. Elle voulait redescendre aussi rapidement que possible. Rester sur les crêtes avec un vent pareil était dangereux.
Elle se souvenait d'une corniche, aperçue en contrebas, qu'elle pouvait peut-être rejoindre en utilisant sa corde, même si la météo ne se prêtait absolument pas à une séance d'escalade. Encore fallait-il que la corniche débouche sur une voie praticable, et, surtout, qui se rapproche du site archéologique. Elle se demandait s'il n'était pas préférable de revenir sur ses pas. Elle s'accroupit pour résister au vent et prit le temps d'analyser calmement les différents itinéraires possibles.

[Galathée]

Il lui fallut près de trois heures pour regagner les ruines et elle y parvint par un tout autre chemin que celui emprunté à l'aller. Elle ne croisa pas de gros prédateurs mais aperçut les carcasses dévorées de grands herbivores et des traces de mauvaise augure. Peut-être le mauvais temps était-il responsable de sa relative tranquillité, ou Tymora, ou un certain sixième sens qui l'écarta des voies dangereuses. Elle atteignit les vestiges alors que les nuages au-dessus d'elle étaient devenus noirs et menaçants, signe qu'il y aurait sous peu un orage. Même si elle n'était pas dans une zone des ruines qu'elle connaissait déjà, son sens de l'orientation était sûrement suffisant pour retrouver l'abri où elle avait passé la nuit.

[Voyageuse]

Astrée avait suffisamment observé le site, depuis les sommets, pour avoir une idée assez précise de l'endroit où se trouvait le lac. Et elle savait situer leur abri par rapport au lac. Elle accéléra le pas dans cette direction : elle voulait récupérer Prince, sa besace avec sa trousse de soins, et ses armes au cas où elles s'avèrent nécessaire.
Il lui faudrait ensuite localiser Kalju, mais cela ne poserait guère de problème : ses traces devaient être facile à repérer dans la neige. Elle songeait qu'il avait dû être plus efficace qu'elle dans ses recherches.

[Galathée]

Astrée mit quelques minutes à s'orienter, puis quelques minutes encore à trouver un passage praticable jusqu'à la grotte. Quand elle y parvint, elle put déduire rapidement que personne n'y était rentré depuis un moment : il y avait presque deux pieds de neige fraîche devant la porte, tombée du ciel et chassée par le vent. Il lui fallut dégager le passage avant de pouvoir rentrer. Il faisait sombre, le feu était éteint, mais Prince dormait en boule de poils, tranquille, sous les couvertures. Au dehors, un premier éclair claqua et le vent se mit à hululer dans les corridors formés par les vestiges rocheux.

[Voyageuse]

Elle hésita à ranimer le feu : un peu de chaleur après cette longue marche dans la neige lui aurait fait du bien. Mais elle jugea avoir perdu suffisamment de temps, et se contenta du peu de tiédeur qui subsistait dans la pièce. Il serait temps de le rallumer ce soir.
Elle retrouva avec plaisir ses bottes, et jugea que ses vêtements étaient suffisamment secs pour être conservés -il n'avait guère neigé depuis son départ. Puis elle vérifia l'état de leur réserve de bois : s'il n'y en avait pas assez pour tenir la nuit, il faudrait songer à en rentrer avant qu'il pleuve ou qu'il neige trop... Mais le plus urgent était de retrouver Kalju. Elle prit son écureuil avec elle, le glissant au chaud dans une poche intérieure, et se mit à la recherche du Génasi, se dirigeant vers le secteur où elle l'avait laissé plusieurs heures plus tôt. Ses traces seraient faciles à suivre dans la neige.

[Galathée]

Mais il avait reneigé depuis, et les traces qu'elle avait suivies plus tôt avaient été ensevelies. Elle se souvenait cependant approximativement du parcours et au prix d'un ou deux détours, elle parvient à l'endroit où elle l'avait quitté plus tôt. Mais c'était plusieurs heures auparavant, et bien sûr, il n'y était plus. Elle crut distinguer des traces qui partaient plus loin dans les méandres du site, les suivit, mais les perdit peu après au détour du passage particulièrement étroit, si elles avaient seulement existé. Il fallut qu'elle se rende à l'évidence : retrouver Kalju dans ce dédale gigantesque et dans ces conditions serait loin d'être aisé.

[Voyageuse]

Astrée était décidée à persévérer. Où qu'il soit, Kalju avait dû marcher dans la neige. Et comme il ne neigeait plus, ses traces les plus récentes devaient être visibles. Puisqu'il envisageait de tout cartographier en partant de l'extrémité du site où elle l'avait laissé, elle pouvait exclure ce côté-ci qu'il avait largement eu le temps d'explorer. Elle pouvait aussi exclure tout le secteur qu'elle avait elle-même traversé : elle aurait repéré des empreintes récentes s'il y en avait eu. Elle essaya d'évaluer le temps qu'il lui fallait pour explorer un secteur donné, mais c'était difficile à estimer. Elle renonça, et se contenta de supposer qu'il avait dû se rapprocher du centre du site, donc du lac... Si toutefois il ne s'était pas perdu : il n'avait pas eu l'air très confiant en son sens de l'orientation. Il était étonnant qu'il ne soit pas revenu manger, d'ailleurs... mais il était inutile de s'alarmer trop vite. Il avait pu prévoir un casse-croûte, après tout.
Elle se dirigea peu à peu vers le centre du site, et le lac, en faisant plusieurs détours au hasard de son inspiration, à la recherche de traces récentes. Elle ne pouvait compter que sur la chance... et se remémorait avoir négligé de prier Tymora.

[Galathée]

Peut-être Tymora était-elle vexée de cette négligence, peut-être pas, mais toujours est-il qu'Astrée ne trouva rien. Aucune trace de passage, aucun signe de Kalju. Evidemment, vu les conditions climatiques, l'épaisseur de la neige et le souffle du vent, la progression dans les couloirs du site était pénible, et Astrée était fatiguée après ses efforts de la journée, métamorphoses multiples, ascension, émotions, redescente. La lumière, aussi, commençait à baisser. Au bout d'une heure, d'une deuxième, elle avait sans doute parcouru au maximum un tiers des ruines... sans rien trouver.

[Voyageuse]

Astrée sentait l'inquiétude l'envahir. Certes, Kalju était adulte, capable de se débrouiller seul, mais il n'avait pas paru très confiant en son sens de l'orientation. Il avait pu se perdre. Et puis, ces ruines pouvaient receler un danger. Elle s'en voulait de l'avoir laissé seul alors qu'elle s'était engagée -au fond de sa conscience- à veiller sur lui.
Mais après tout, elle n'avait visité qu'un tiers des lieux, et il pouvait être ailleurs. Il pouvait aussi avoir trouvé un tunnel et s'y être engouffré... sans attendre son retour. Si seulement elle avait pu se retransformer en animal pour tenter de retrouver son odeur...
En désespoir de cause, elle décida de rejoindre le lac. Peut-être Kalju avait-il pu déterminer que le centre du phénomène se trouvait là-bas. Peut-être s'y trouvait-il. Et puis, elle était curieuse de l'examiner avant la nuit. Elle se souvenait de la lumière verte aperçue la veille, à son arrivée, différente des globes magiques qui illuminaient son chemin, et elle se demandait d'où elle provenait.

[Galathée]

Astrée atteignit les bords du lac, vaille que vaille, alors que le ciel avait viré au noir. L'orage, qui s'était contenté de tonner jusque là, promettait de déverser ses lances glacées sur les ruines, et malgré son équipement, la jeune femme serait immanquablement trempée si elle ne se mettait pas à l'abri. Mais elle avait encore quelques minutes de répit. Dans la pénombre précédant la tourmente, elle put observer l'île au centre du lac, un promontoire rocheux au coeur duquel brillait une lumière verte, pulsatile, dont on ne pouvait distinguer clairement la source. Il était possible de l'atteindre à la nage, théoriquement du moins, car l'eau était glaciale et mortelle. Il n'y avait pas signe d'embarcation. Pas signe de Kalju non plus.

[Voyageuse]

Elle observa les lieux en se posant mille questions sur la nature de cette lumière verte. Avait-elle été créé par les archéologues ou était-elle présente "naturellement" ? Et dans ce dernier cas, était-elle présente constamment, depuis des mois, des années, ou apparue récemment et liée aux disparitions ?
D'autre part, il lui semblait probable que les archéologues soient allés explorer les lieux. Donc il devait y avoir une embarcation quelque part. Avait-elle été utilisée par les disparus ? Se trouvaient-ils là-bas ?

Quoiqu'il en soit, elle ne pouvait pas s'y rendre elle-même, pas sans une barque ou un radeau. Peut-être trouverait-elle ce genre de chose dans les ruines les plus proches du lac : on pouvait y avoir rangé une embarcation à l'abri. Mais l'expédition devrait attendre. Elle devait d'abord retrouver Kalju. A moins qu'il ne soit là-bas... ce qui lui semblait assez peu probable.
Cependant, le ciel devenait trop menaçant et elle décida de revenir à leur abri et d'y rassembler du bois pour rallumer un bon feu. La priorité, en cette saison, était toujours d'être au sec et au chaud. Elle espérait que Kalju aurait la sagesse de revenir rapidement, lui aussi.

[Galathée]

Astrée fit les derniers mètres sous une grêle violente, peut-être un autre signe que Tymora n'était pas très heureuse. L'abri lui parut bien agréable en comparaison avec l'extérieur, mais il faisait en réalité bien froid — sa respiration s'envolait en volutes blanches — et les dernières braises du feu s'étaient éteintes. Pour contrebalancer son manque de chance, elle trouva une réserve de bois conséquente dans un des coins de la pièce. Une aubaine, car elle n'en aurait trouvé nulle part dans les ruines : elles étaient roche, roche et roche, sans la moindre trace de végétation, et les premières sources de combustible devaient se trouver hors du site, sur le plateau aux trolls.

[Voyageuse]

Astrée se doutait que les archéologues avaient constitué quelque part un stock de bois pour se chauffer, mais elle était soulagée de le trouver dans la pièce. Peut-être les mercenaires l'avaient-ils transporté la veille depuis la réserve habituelle. Elle était consciente que si elle avait dû fouiller par elle-même tout le site, elle ne s'en serait pas sortie...
Elle se changea aussitôt, enfilant avec soulagement des vêtements secs. Puis elle arrangea soigneusement des bûches de taille diverse dans le foyer de la cheminée, y mit le feu en utilisant de son sortilège de production de flamme, et attendit patiemment que le feu prenne. Elle prit quelques minutes pour remercier Tymora pour ce petit coup de pouce -qui était certainement dû à la prévenance de leurs guides davantage qu'à la chance, mais rattraper son retard de prière ne pouvait pas faire de mal, et puis, elle n'avait rien d'autre à faire en attendant Kalju.

[Galathée]

L'orage hurlait au dehors, elle devinait les éclairs au travers des fentes du bois, en zigzag incandescents et le vent semblait désireux d'enfoncer la porte. Il n'y parvint heureusement pas. L'atmosphère se réchauffa dans la petite pièce noire, mais le feu tirait mal et l'air s'emplit d'une brume un peu piquante. La tempête avait l'air bien installée sur le site et il était impossible — à moins de magie — de déterminer quand elle se lèverait. Kalju, de son côté, ne semblait pas vouloir rentrer, qu'il ait préféré s'abriter quelque part ou qu'il lui soit arrivé autre chose.

[Voyageuse]

Astrée s'en tenait à l'hypothèse la plus optimiste : Kalju s'était certainement abrité quelque part. Il ne rentrerait pas avant la fin de la tempête, ou avant le soir. S'il ne s'était pas perdu, bien sûr... Quant à elle, elle n'avait pas grand-chose d'autre à faire qu'à attendre : aller affronter la tempête sans savoir où le chercher serait bien évidemment stupide. Elle s'occupa donc à entretenir le feu, luttant contre l'inquiétude. Elle songeait que la tempête allait effacer les dernières traces et qu'elle aurait encore plus de mal à le retrouver s'il ne revenait pas de lui-même. Mais elle ne pouvait, hélas, rien y faire.

Puis elle laissa ses pensées dériver vers Dimitri, se demandant où il pouvait être. Sans doute avait-il rassemblé quelque part des provisions et du bois, dans un autre abri du site. C'était le plus probable. Elle songea qu'elle ne l'avait même pas remercié d'avoir ramené Prince... Il faudrait qu'elle réussisse à le croiser, au moins pour cela.
Elle s'aperçut qu'elle s'était mise à faire les cent pas, un peu trop nerveuse. Elle jeta deux bûches supplémentaires dans le feu et décida de se donner encore une demi-heure. Si la tempête ne donnait pas l'impression de faiblir, elle userait d'un sortilège pour essayer de prévoir l'évolution des conditions météorologiques.

[Galathée]

Kalju ne revint pas et les nouvelles furent mauvaises : la tempête allait durer et durer encore, sans doute toute la nuit si pas davantage. Il serait sans doute nécessaire d'aérer, à un moment ou un autre, sous peine d'être asphyxié. Tout, autour de la druidesse, s'imprégnait d'une bonne odeur de fumée, qui promettait d'être tenace. La fatigue prenait à nouveau Astrée d'assaut, de la tête aux mollets, petit rappel d'une journée très chargée. Ou alors c'était l'air vicié. Ou les deux. Probablement les deux.

[Voyageuse]

Elle se décida à ouvrir la porte, en grand, pour aérer la pièce, en espérant faciliter en même temps le tirage. Les cheminées tiraient toujours mal quand il faisait orageux, elle le savait. L'air froid s'engouffra dans la pièce, lui fouettant le visage et la tirant de sa torpeur. Elle était fatiguée, bien sûr, elle avait toutes les raisons pour cela. Mais il n'était pas question de laisser Kalju seul dans la tourmente, où qu'il se trouve.
Elle enfila son manteau et resta quelques minutes à activer le feu, la porte grande ouverte derrière elle. Puis elle s'approcha du yack dont elle vérifia l'état : il ne fallait pas qu'il s'asphyxie, lui non plus. Se souvenant qu'il n'avait pas mangé depuis la veille au soir, elle chercha un peu de fourrage et y ajouta une baie magique : il lui semblait que ce devait être une nourriture adaptée à toutes les races. Elle sortit dans le froid pour lui remplir un seau de neige fraiche en guise d'abreuvoir, et décida d'attendre encore un petit moment, assise près de lui, que l'air se renouvelle complètement. Ensuite, elle ressortirait à la recherche du génasi, sans fermer totalement la porte pour ne pas asphyxier l'animal.

[Galathée]

Kimik somnolait mais c'était difficile de savoir pourquoi : le manque d'air ou l'ennui. Elle ne broncha pas, mangea du bout des lèvres, puis se coucha à nouveau pour ruminer tranquillement. L'eau ne lui fit pas davantage d'effet, mais Astrée n'eut pas l'impression qu'elle était mal en point. Elle était sans doute adaptée à un mode de vie rude, avec des périodes de disette, de sécheresse et de manque d'oxygène.
Le froid contrastait violemment avec la brûlure de l'âtre et Astrée peina à trouver un endroit où la température était supportable, ni trop chaude, ni trop froide. Elle finit par sortir, sous les bourrasques de neige glaciale et quelques pas plus loin, tout souvenir du feu fut effacé : le gel était maître, le gel et les ténèbres, et elle ne pourrait pas aller bien loin sans une lumière. Les globes de la veille luisaient, mais pas assez et pas partout...

HRP : je suppose que Prince est toujours dans sa poche ?

[Voyageuse]

HRP : oui, sauf s'il veut rester au chaud...

Elle s'en revint à l'abri pour tenter de trouver, dans tout le fratras, quelque chose ressemblant à une lampe tempête. Elle pouvait, à défaut, confectionner une torche avec une tige de bois et des chiffons imbibés d'huile, mais celle-ci risquait de ne pas survivre aux rafales de vent.
Elle en profita pour laisser le choix à Prince : il pouvait rester dans la chaleur toute relative de la poche intérieure de son manteau, ou opter pour la chaleur enfumée et pas forcément durable de leur abri. Elle l'avertit qu'elle préférait l'avoir avec elle au cas où son absence se prolonge trop, mais elle était décidée à respecter son choix.
Une fois qu'elle aurait trouvé une lampe -si elle y parvenait-, elle ressortirait affronter le froid et la nuit. Elle comptait faire le tour des lieux, en commençant par les secteurs qu'elle n'avait pas encore visités, et en appelant Kalju régulièrement de toute sa voix.