[RP : l'inattendu] Dans les cryptes abandonnées

[Lothringen]

En provenance de

A vrai dire, Lothringen aurait préféré marcher plusieurs pas en avant, afin de pouvoir user de son infravision que la torche aveuglait. Il choisit cependant de n'en rien dire, devinant que Mornagest n'apprécierait guère la suggestion. Et après tout, le côte à côte avait ses avantages : c'était trop rarement qu'il affrontait le danger avec un compagnon d'arme de valeur auprès de lui. Il y avait bien eu Seina, mais Seina était versatile, alors qu'il se fiait entièrement à Mornagest – une différence de taille.

"Entendu. Avançons lentement: nous n'avons aucun autre moyen que nos yeux, pour détecter les pièges."

Cela dit, il comptait davantage sur le témoignage des traces de pas – piétinements, interruptions, contournements - que sur une inspection du décor pour repérer les dangers éventuels. Inconsciemment, il s'était mis à murmurer.

"La dernière fois que je suis descendu dans ces cryptes, j'y ai trouvé un hiérophante fou plus grand magicien que je ne suis, un nid de vampires assassins et l'antre de Walar... J'ai dû plus souvent la vie sauve au hasard, à la ruse ou à la fuite qu'à mes performances au combat. Tu penses si j'entre là-dedans la fleur entre les dents..."

[Mornagest]

Il ne put qu'acquiescer d'un "Mmh..." bref, tout attentif aux traces de pas qui semblaient créer un véritable sillon parmi la poussière accumulée sur les pierres. Ils marchaient côte à côte, scrutant qui le sol, qui les murs ou le plafond, dont la surface irrégulière laissait à penser qu'il avait été taillé directement dans la roche.

Le vent continuait de siffler doucement dans leurs oreilles, laissant une vague odeur de moisissure flotter dans l'air.

Ils avaient parcouru une cinquantaine de mètres, pratiquement en ligne droite, tout en suivant les traces de pas. De part et d'autres s'ouvraient régulièrement des passages secondaires, dans lesquels les ténèbres paraissaient encore plus insondables que celui dans lequel ils se trouvaient, si c'était possible.

Or soudain, les traces de pas s'arrêtaient, pour la simple et bonne raison que la poussière avait disparu... À cette hauteur, nul passage connexe. Seul le couloir principal se poursuivait, avec, au fond, environ trente mètres plus loin, quelque chose qui semblait être un coude, d'après les vagues reflets que les pierres renvoyaient de la lueur de la torche.

"Ça commence bien..." soupira Mornagest. "Tu disposes d'un sort qui pourrait nous donner une idée de la direction à prendre ?"

[Lothringen]

Lothringen fronçait les sourcils et scrutait les parois, étonné de voir la poussière s'interrompre aussi soudainement, alors qu'aucune bifurcation ne pouvait laisser à penser que c'était là l'œuvre des courants d'air. Comment l'expliquer ?

A la question de Mornagest, il oublia provisoirement le problème pour repasser mentalement en revue la liste des sorts qu'il avait préparés la veille. Il s'était attendu à devoir espionner un lieu précis ou à combattre, pas à suivre une piste... Il hocha piteusement la tête en signe d'impuissance.

"Non, je ne vois pas... Cela dit nous n'avons guère à choisir, pour l'instant. L'envol inopiné de la poussière me trouble davantage."

A toutes fins utiles, il ramassa un gros bloc de pierre et le jeta de toutes ses forces cinq ou six pas devant eux. Juste pour vérifier qu'il n'y avait pas de piège, trappe, faux plafond, pierre qui roule, parois rétrécissantes... En la matière, l'imagination humaine semblait intarissable.

[Mornagest]

Rien d'autre que le bruit d'une pierraille qui roulait sur quelque chose d'assez rugueux. Mornagest tentait de scruter les ténèbres, et s'aperçut d'une chose qui pouvait peut-être expliquer ce phénomène.

"Ce ne sont plus des dalles, plus loin, mais du calcaire. L'eau dégoutte du plafond, regarde." En levant au maximum la torche, il pouvait deviner les éclats de l'eau qui perlait en bas des stalactites, et qui, de temps en temps, s'effondrait silencieusement au sol, sur la surface glissante lavée de la grotte naturelle.

"J'ignorais que les souterrains menaient à des cavernes." Il traça rapidement quelques traits sur un bout de parchemin, esquissant les couloirs de traverse jusqu'à l'endroit où ils se tenaient.

Pendant ce temps, Lothringen venait de déceler des encoches profondes dans les dernières pierres du mur. Des traces de rouille qui avait dégouliné étaient nettement visibles.

"Il y avait une grille, là." Pourquoi l'avait-on retirée, mystère... peut-être pour accéder au réseau plus discret que les catacombes, trop et mal fréquentées ?

"Plus loin, je n'ai pas l'impression qu'il y ait d'autres couloirs. Si les traces de pas s'arrêtent ici, et que le tunnel n'a qu'une issue, on devrait y arriver... qu'en dis-tu ?"

Un couinement de rat lui parvint en guise de réponse.

[Lothringen]

Lothringen hocha la tête en signe d'acquiescement. Ils devraient y arriver, oui... Mais des grottes calcaires, ici ? Les catacombes de Melandis recélaient décidément bien des mystères. La nécropole devait être plus vaste encore que la cité des vivants au-dessus d'elle. Il s'en était déjà fait la réflexion, autrefois, en parcourant des salles immenses et vides aux dimensions de véritables palais souterrains. Une architecture plus vieille que l'impératrice Venuma, sans nul doute...

Les deux mondes s'ignoraient, en miroirs pourtant l'un de l'autre. Ici la fausse vie, là la fausse mort... Quelles merveilleuses surprises allaient pouvoir leur réserver ces cavernes? S'ils n'y trouvaient que des rats et des sacrifices d'enfants, ce serait déjà trop.
Sans mot dire, et plus aux aguets que jamais, le semi-drow se remit en route, en veillant à ne pas glisser sur la roche humide.

[Mornagest]

L'atmosphère humide se réchauffait curieusement, rendant l'air désagréable à respirer. Ajouté à l'odeur qui se faisait progressivement plus chargé en relents de pourriture, et l'aventure promettait d'être un véritable calvaire pour les deux compagnons.

Mornagest faillit se rompre le cou en glissant sur une marche, qui était bien évidemment suivie de plusieurs autres de ses semblables... s'il ne s'était rattrapé à Lothringen, il se serait brisé la nuque sur l'une des arêtes érodée mais solide.

Se redressant avec un juron, le guerrier reprit en main la torche qu'il avait laissé tomber pour l'occasion, et se redressa en s'excusant de sa maladresse.

"Je suis un peu tendu. Ces souterrains ont de quoi mettre mal à l'aise..."

Quelques minutes plus tard, ils atteignirent enfin le fameux coude, qui aboutissait... sur un cul-de-sac. Le passage avait été muré à la hâte avec des briques sombres, et cela, récemment. Aucune issue ? D'où venait le mioche ? Mornagest tournait en rond, cherchant des yeux un éventuel passage, lorsque sa maladresse intervint à nouveau. Il se prit le pied dans une grille métallique obturant un orifice dans le sol, sur le côté du boyau, choyant au sol et soulevant la grille de quelques centimètres avec un grincement désagréablement répercuté contre les parois du tunnel.

Jetant un œil, Lothringen y décela des échelons fichés dans la roche. La profondeur de la cheminée était inestimable, les ténèbres étant trop denses.

"Ça me paraît de plus en plus louche, cette histoire", confia le mélandien.

[Lothringen]

"Je suis du même avis..." répliqua le semi-drow en tentant de sonder la profondeur de ce trou noir.

Il y avait en effet de quoi devenir perplexe. L'enfant avait parlé de course au hasard dans le dédale, pas d'échelle de fer ni de grottes. De plus, cette chaleur, ces cavernes, ce cadenas dérisoire, ce mur édifié à la hâte... Et si c'était quelque chose que l'on voulait empêcher de sortir, plutôt que de les empêcher d'entrer ? A tout prendre, ils pourraient aussi bien être de train de courir à l'antre d'un dragon : tous les indices concordaient. Restaient tout de même ces nombreuses traces de pas dans la poussière...

"Et je commence sérieusement à me demander si le gamin ne s'est pas trompé de grille. Qu'en penses-tu ? Vaut-il mieux aller jeter un coup d'œil là en bas, ou prendre la peine de retourner chercher si parmi les trois grilles que nous n'avons pas vues il n'y en a pas une autre avec des pointes dorées mais pas de cadenas ?"

S'il avait été seul, la curiosité aurait été la plus forte, et il serait descendu quand même, serait-ce pour s'enfuir en quatrième vitesse par la suite. Mais il n'était pas seul, et se devait de prendre en compte les risques encourus et le manque de temps à perdre.

[Mornagest]

Mornagest grommela. Il hésitait lui aussi, et détestait cela. La tournure des évènements ne lui plaisait pas, mais d'un autre côté, ils n'allaient pas passer trois heures à tergiverser... le temps pressait. La disparition du fossoyeur pouvait être rapidement remarquée, et le lien avec la secte fanatique serait rapidement établi.

"Au point où nous en sommes, descendons quelques instants, voir si on retrouve une quelconque piste. Mettons que si on ne trouve rien, on remonte, et on cherche une autre entrée. Sans oublier que les mercenaires que tu as demandés arriveront peut-être bientôt."

Il souleva à nouveau la grille, qui pivota lourdement sur ses charnières, puis descendit méthodiquement chaque échelon, s'assurant auparavant qu'il était suffisamment solide pour supporter son poids. Curieusement, le fond de la cheminée n'était pas très loin. De la lueur de sa torche, il vit un vague reflet ondulant, et comprit qu'il y avait de l'eau, plus bas. Il fit part de sa découverte à son compagnon, ajoutant :

"Je vais voir si ce n'est pas très profond. Sinon, nous n'aurons plus qu'à faire demi-tour. À moins que tu préfères remonter maintenant ?"

[Lothringen]

Puisqu'ils étaient parvenus jusque là, autant aller jusqu'au bout de leur enquête et vérifier si l'issue était bel et bien bloquée.

"Non, autant inspecter tant que nous y sommes... Sois prudent."

Mornagest ayant emporté la torche avec lui, Lothringen se retrouvait dans les ténèbres les plus complètes, avec la très nette impression de ne servir à rien. Il n'y avait plus qu'à espérer que le guerrier n'allait pas déboucher dans l'eau putride des égouts, ou déranger quelque monstre marin...

Par curiosité, le semi-drow alla tâter le mortier du mur qui leur bouchait le passage, afin de déterminer si ce dernier datait de quelques heures, quelques jours, ou beaucoup plus. Dans l'humidité ambiante, ça ne devait pas sécher très vite.

[Mornagest]

Malheureusement, le mortier avait prit et séché depuis un long moment ; plusieurs semaines, jugea Lothringen, sans pouvoir l'affirmer. Cette issue avait été bloquée dans un but particulier, il le sentait, mais lequel, et par qui ?

Il en était à ce point dans ses réflexions lorsqu'il entendit un nouveau juron résonner contre les parois de la cheminée, suivit d'un bruit d'éclaboussure prononcé.

"Tombé dans... hum, on ne va pas appeler ça de l'eau. Je pense qu'on est dans les égouts. Il y a de la lumière, vers la droite."

Mornagest avait réussi à éviter à la torche de tomber dans l'eau croupie ; il était immergé jusqu'à la moitié des cuisses.

"Et il y a un genre de rebord. Fais attention... le dernier échelon a cédé sous mon poids".

La chute du guerrier avait remué la vase pourrie, dont l'odeur prenante embaumait désormais l'air ambiant, chargé d'humidité chaude et sale. Une véritable promenade de santé.

[Lothringen]

Où cela pourrait-il les conduire ? Ils paraissaient s'éloigner de plus en plus de leur but initial. Lothringen se demanda si une secte quelconque pourrait pousser le fanatisme jusqu'à imposer à ses adeptes de traverser les égoûts avant chaque séance, en guise de bain lustral. Il se demanda aussi si le fait d'être prêt à suivre Mornagest jusqu'au bout du monde ne souffrait pas dérogation pour un endroit de ce genre... Cela ne dura que le temps d'un grognement mental, bien sûr, et il descendit bravement l'échelle, tâtant du pied à chaque nouveau barreau. Quand il arriva au niveau de l'échelon descellé, il souffla:

"Ecarte-toi, j'arrive... Youpi !"

Et il sauta à pieds joints dans le magma parfumé, où Mornagest le rattrapa de justesse de la glissade immersive. En se redressant, Lothringen se mit à sourire, tout en respirant à plein nez la pestilence locale. Ce soupçon de ridicule le remettait curieusement de bonne humeur.

"Merci bien... Au fait, je t'ai pas dit ? Je ne sais toujours pas nager !"

Il jetait des regards avides de gauche et de droite, pour repérer les lieux, et voir par lui-même à quoi ressemblait cette fameuse lueur.

[Mornagest]

Le mélandien éclata de rire en voyant l'air mi-amusé, mi-sérieux de son compagnon. Un peu de légèreté ne leur faisait pas de mal ; il était lui-même très tendu depuis qu'ils étaient entrés dans ces cryptes, et maintenant qu'ils pataugeaient allègrement dans la fange, tout semblait bien moins dramatique...

"Tant que je suis là pour te sauver, tout ira bien", répliqua Mornagest, en indiquant le bout du boyau, là où se diffusait une lueur provenant sans nul doute d'une torche, à voir sa clarté vacillante vaincre péniblement les ténèbres alentours.

"Je me demande si cela mène vers leur tanière..."

Il se remit en route, prenant garde à ne pas glisser sur les pierres couvertes d'eau croupie et probablement gorgée d'une foultitude de microbes tous plus dangereux les uns que les autres... un bon bain ne leur ferait pas de tort ; heureusement, leur odeur était bien couverte par la puanteur ambiante.

Le trajet fut bref ; le couloir s'achevait par une porte en bois massif, à côté de laquelle trônait ladite torche. Aucun cadenas n'équipait la serrure, apparemment...

[Lothringen]

Le semi-drow regardait autour d'eux. Cette torche... L'entrée était donc encore utilisée ? N'y avait-il aucun autre moyen d'y accéder qu'en passant par les égouts ? Se pourrait-il malgré tout qu'ils soient parvenus au bon endroit, bien qu'étant très vraisemblablement entrés par une issue qu'on avait voulu condamner ? Inutile de ratiociner davantage, tant qu'ils n'auraient pas ouvert cette porte, ils piétineraient dans le cloaque... au sens "propre."

Ils s'arrêtèrent à quelques pas du seuil. Pas de cadenas à briser. Et au niveau de la serrure ? Avec un peu de chance, la porte accepterait de s'ouvrir sans qu'ils aient à recourir aux grand moyens de métal et de sortilèges. C'était à tenter, du moins...

"Reste à distance et sors ta lame... je vais "peut-être" ouvrir."

Lothringen incanta rapidement un sort mineur généralement utile en ce genre d'occasion, puis regarda sa cible droit dans les gonds et déchaîna sur elle sans vergogne le tourbillon magique d'un sortilège de niveau apprenti.

Lothringen = = > ouverture = = > arrogante porte de bois massif

[Mornagest]

Un petit frémissement vint troubler la quiétude de la porte, mais vu sa taille, elle devait être pesante. Cependant, rien ne se produisit d'autre ; pas de déclic, signal de l'ouverture du verrou ou du pêne glissant en dehors de la gâche...

Mornagest grogna. Ces abrutis avaient peut-être simplement barré la porte de l'autre côté... de frustration, il frappa contre le bois du poing, s'arrachant par la même occasion une grimace de douleur. Et la porte grinça sur ses gonds, s'ouvrant vers la suite du couloir.

Ils purent alors voir que toute la serrure était pourrie de rouille, et qu'elle n'avait guère résisté à la maigre impulsion donnée par Mornagest.

"Mouais... pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué, hein ?"

Ils avancèrent prudemment dans le nouveau couloir, guère plus large que les autres, mais ils n'avaient pas fait plus de trois pas qu'une masse d'armes jaillissant de nulle part s'abattit dans le dos de Mornagest, qui chut au sol en hurlant. Lothringen vit furtivement un homme tapi dans l'ombre, derrière la porte, dégainer une râpière et bondir sur lui avec une vitesse affolante.

[Lothringen]

Il avait été tellement rapide que Lothringen n'avait pas eu seulement le temps d'incanter le moindre sort de protection, et qu'il avait dû se contenter de parer la première attaque comme il avait pu, en déviant la lame de la rapière : s'il était un reproche que l'on pouvait faire à ses haches de bataille, c'était celui d'être des armes d'assaut d'assez piètre efficacité dans la parade. C'était qu'en temps ordinaire, le semi-drow comptait sur ses sorts pour dévier ou absorber les attaques...

Sachant qu'il n'en aurait peut-être plus l'occasion longtemps, Lothringen croisa ses haches au niveau de la garde de son adversaire, rassembla ses forces et le repoussa brutalement à quelques pas. Simple répit pour incanter.

Lothringen = = > image miroir = => Lothringen

Il s'efforça alors de trouver la faiblesse de la défense adverse avant que son vis-à-vis n'ait le temps de trouver les siennes, ce qui risquait de ne pas tarder. Il n'était pas un combattant de première ligne, pourquoi le destin s'acharnait-il ainsi! ( ) D'instinct, Lothringen s'était mis dos à la porte, et il gardait un œil sur Mornagest, dans l'espoir de voir ce dernier se relever promptement.

[Mornagest]

Le mélandien gigotait quelque peu au sol, grognant de douleur, et relevait tant bien que mal les bras pour tenter de se redresser, mais il semblait sonné pour le compte.

L'assaillant, quant à lui, n'était pas en reste ; il maniait apparemment aussi finement la magie que les armes...

Assassin ---> peau de pierre ---> assassin

À la faible lueur de la torche sise de l'autre côté de cette maudite porte, la peau de l'homme avait prit un teint bistre, lui donnant une vague apparence de spectre décharné. En l'occurrence, son arme était bien réelle, et il tentait vicieusement d'aller embrocher Mornagest alors qu'il était encore au tapis, au mépris total de Lothringen pour l'instant, même s'il lui jetait de fréquents coups d'œil.

Au loin, un appel surgit du bout du couloir, provenant d'on ne savait où. Des ennuis en perspective...

[Lothringen]

Il aurait pu faire un peu plus dans la finesse mais la perspective de voir surgir de nouveaux arrivants et la menace que leur agresseur faisait planer sur le corps étendu de Mornagest réclamaient un dénouement rapide: une main plongée dans l'une des innombrables poches de sa cape, là où gîtaient ingrédients de sorts et focaliseurs, Lothringen incanta de nouveau... un sort bref, un sort de devin amateur...

Lothringen = = > coup au but = = > Lothringen

...Un sort qui lui apprit d'instinct l'endroit où la peau de pierre de l'assassin était la plus fine, où le coup qu'il voudrait porter s'avérerait le plus efficace : il s'approcha brusquement et le frappa alors, après une feinte de la Dextre vers le flanc, à la pliure arrière du genou gauche.

[Mornagest]

Le tranchant de la hache buta furieusement contre la peau artificielle de l'assassin, mais ne parvint qu'à entailler légèrement sa véritable peau ; il disposait d'un sortilège plus puissant que la normale. L'homme se retourna, et se décida à se débarrasser de cet encombrant drow avant d'en finir avec l'autre balourd...

... balourd qui se remettait péniblement sur pieds. Il entrevoyait les mouvements rapides de l'assassin et de sa râpière, qui tentait de toucher le Lothringen original parmi toutes ses copies. Plus instinctivement qu'autre chose, Mornagest dégaina enfin son arme, et vint se joindre au combat.

De l'autre côté du couloir, des cris retentirent à nouveau et le bruit de bottes résonnaient dans le tunnel. Ils devaient être à une trentaine de mètres, au plus. Le temps pressait.

[Lothringen]

Maintenant qu'ils étaient deux contre un, Lothringen avait bon espoir qu'ils parviennent enfin à faire un sort à cet assassin, tout surpuissant qu'il paraisse par rapport à un combattant ordinaire. Il n'était pas fréquent de voir un combattant alterner masse, rapière, et une magie aussi efficace.

Le semi-drow préféra donc profiter du répit que lui ménageaient ses doubles illusoires pour préparer un comité d'accueil à leurs nouveaux invités.

Lothringen = = > mur de feu = = > à quelques pas dans le couloir.

Des flammes immenses se mirent à lécher l'air, barrant entièrement le passage. Lothringen sourit tout en revenant à leur adversaire. Il appréciait beaucoup les sorts de feu...

[Mornagest]

Le bruit des flammes envahissant le couloir couvrit celui des guerriers qui grognaient et criaient de frustration ; la perspective d'un bon combat les avaient bien échauffés. En revanche, la fumée dégagée par les flammes rendraient l'atmosphère rapidement étouffante, pensa subitement Mornagest, tandis qu'il esquivait une feinte de son adversaire.

Contraint de combattre deux guerriers rompus au corps-à-corps, l'assassin ne pouvait désormais plus qu'éviter les coups que lui portait Lothringen, tandis que les assauts de Mornagest se faisaient plus précis, à mesure que la douleur, toujours lancinante, perdait peu à peu son intensité.

L'assassin tenta une dernière parade, cependant.

Assassin ---> invisibilité majeure ---> assassin

Leur homme disparu aussitôt. Le mélandien essayait de le toucher, à l'aveuglette, mais il avait apparemment choisi un recoin où il serait hors d'atteinte...

[Lothringen]

Le semi-drow grogna, comme à chaque fois que la situation l'obligeait à gaspiller des sortilèges. Si le combat durait trop, si la journée durait trop, viendrait un moment où ces derniers lui feraient défaut. Le subtil dosage entre emploi opportun et dilapidation constituait en combat une des difficultés essentielles de la carrière magique, et Lothringen n'était pas certain d'avoir toujours la patience nécessaire.

Bien qu'il n'ait pas de sort de détection de l'invisibilité en mémoire, le devin avait ainsi plusieurs sorts disponibles : il pourrait lancer un sort de ténèbres, pour repérer leur adversaire à la chaleur qu'il dégageait... Mais Mornagest s'en retrouverait handicapé. Il pouvait aussi employer une scrutation, mais c'était un sort de haut niveau, précieux pour la suite ! Les plonger eux-mêmes dans l'invisibilité serait une fausse bonne idée ; l'assassin frapperait plus tard, quand ils auraient engagé le combat contre ses collègues et l'auraient oublié... Il songeait à cela tandis que ses haches accomplissaient machinalement des moulinets dans l'air, à l'instar de Mornagest, pour vérifier que l'adversaire ne s'approchait pas trop. Puis il trouva une solution qui lui sembla bonne, et il jeta son sort.

Lothringen = = > détection de la magie

Le semi-drow balaya alors du regard la zone environnante. Où que soit l'homme s'il n'avait fui jusqu'aux égouts, le sort qu'il avait activé le dénoncerait, et Lothringen pourrait repérer son aura.

[Mornagest]

Sitôt le sortilège jeté, une silhouette rougeâtre se dessina dans le couloir passablement mal éclairé, située à quelques pas des deux combattants, vers les gens qui arrivaient maintenant dans leur direction. Avec l'assassin maintenant découvert, ils étaient quatre, armés qui d'un gourdin, qui d'une épée en plus ou moins mauvais état. Le dernier ne portait aucune arme, ce qui laissait présager qu'il était un lanceur de sortilèges divins ou profanes.

Mornagest se hâta d'aller frapper l'assassin pendant qu'il en avait l'occasion. En quelques enjambées, il avait rejoint l'homme, et l'attaqua de front. Il para sans difficulté, mais ne fut pas assez rapide pour esquiver un nouvel assaut bien plus violent ; le guerrier était à présent empli de rage envers son agresseur, et entendait bien lui faire passer le goût de la plaisanterie.

À environ cinq mètres de là, les autres chargeaient du mieux qu'ils pouvaient, vu la largeur restreinte du tunnel, qui ne permettait de combattre qu'à deux de front, sans réelles possibilités de mouvements amples.

Derrière, l'homme non armé s'arrêta quelques secondes, joignant les mains et fermant les yeux. Une curieuse lueur jaunâtre les envahit lorsqu'il les rouvrit, et il brandit ses poings avec un sourire mauvais à l'adresse de Mornagest. Un moine...

[Lothringen]

Lothringen ne connaissait pas grand chose au mode de combat des moines ; ce n'étaient pas des adversaires que l'on rencontrait fréquemment sur un champ de bataille, et l'essentiel de l'expérience du semi-drow provenait de ses divers engagements militaires, sur Féerûne : aussi n'avait-il pas une idée très claire de ce que le moine préparait, mais il n'avait pas besoin de cela pour deviner que c'était une attaque magique violente, et qui risquait de mettre son compagnon hors de combat.


Or Mornagest était fragilisé par le poison de la veille... Or il l'avait vu trop souvent servir de cible, ces derniers temps. Peut-être un recoin de son esprit affirma-t-il en outre que d'eux deux seul le guerrier était en mesure d'assurer à lui seul une première ligne, mais il n'est pas certain que le semi-drow eut véritablement le temps d'en formuler consciemment la pensée : lorsque la magie fusa des mains du moine, il se jeta de côté d'un mouvement quasi instinctif, poussant son compagnon pour prendre le coup à sa place...

[Mornagest]

Le coup solaire fusa, et tout ce que Lothringen put percevoir, ce fut une lueur brève mais intense, et une douleur fulgurante au niveau des tempes, avant de s'évanouir totalement et sombrer dans les ténèbres les plus profondes.

De son côté, Mornagest venait de percuter le mur, emporté par le poids de son compagnon qui, dans un acte de folie inconsidéré, avait reçu le coup à sa place, chutant au sol avec un bruit mat. Il ne put éviter un revers de gourdin en plein visage, qui l'assomma sèchement, lui occasionnant une blessure superficielle au niveau de la joue...

Des années plus tard, Lothringen ouvrit les yeux. Il était allongé sur un sol dur et humide. Son corps entier lui faisait souffrir le martyre, constata-t-il rapidement en esquissant un vague mouvement. Il avait les mains et les pieds liés, et son équipement lui avait été dérobé. À sa gauche, un corps était affalé à terre. Mornagest, à en juger par ses dimensions. Il respirait régulièrement.

L'obscurité était presque totale, mais le semi-drow n'en avait cure. Ils étaient dans une sorte de cage enclavée dans une paroi d'une grotte, barrés derrière une solide grille en métal. Pas de signe de vie en dehors d'eux-mêmes.

Le guerrier s'agitait dans son sommeil forcé.

[Lothringen]

Son regard flottait sur le triste bilan de son intervention, tandis qu'il s'efforçait péniblement de se redresser contre la paroi. Il avait des élancements douloureux dans tous les membres, souvenir, sans doute, de l'attaque du moine, et les liens lui sciaient les articulations.

"Une riche idée que tu as eue..."

Mais il ne pouvait savoir que c'était à cause de lui que Mornagest s'était fait prendre, et rien ne lui garantissait que les choses auraient beaucoup mieux tourné s'il ne s'était jeté de la sorte au-devant des ennuis. Du reste, ce n'était plus à refaire ; inutile de s'y attarder.

Il rampait contre le fond de la grotte, en quête d'une arrête saillante où frotter ses entraves. Quand il aurait les mains libres, ils pourraient filer. Et mieux vaudrait ne pas traîner dans les parages...

[Mornagest]

Après bien des efforts, Lothringen parvint à atteindre un fragment de roche qui paraissait suffisamment affûté pour tenter de trancher ses liens. Une vaste tâche... d'abord, l'attraper. Au bout de plusieurs minutes, il saisissait l'arête tranchante et cisaillait tant bien que mal la corde qui lui enserrait les poignets. Le semi-drow suait à grosses gouttes sous l'effet de la concentration, se coupa plusieurs fois la peau, s'écorcha en frottant contre le sol... mais au bout de longues minutes qui lui parurent une éternité, il arriva enfin à se défaire de ses entraves.

Pendant tout ce temps, Mornagest s'était plus ou moins remis de son coup à la tempe, et il grognait de manière plus compréhensible qu'auparavant.

Le manostien allait s'attaquer aux cordes qui lui liaient les chevilles lorsque l'écho de pas se fit entendre dans la grotte. Avec empressement, il reprit tant bien que mal son ancienne position, remettant les mains derrière le dos, espérant que l'inopportun n'allait pas vérifier leurs liens...

Un homme apparut quelques instants après, muni d'une torche. Une épée engainée cinglait sa cuisse. Il avait un visage dur, orné d'une longue cicatrice. Ses lèvres n'étaient qu'un trait, tandis que ses yeux plissés semblaient scruter le moindre détail.

"Alors, voilà les fameux conseillers... pas très prudent, de s'aventurer dans le coin. Si ça dépendait de moi, je vous aurais simplement égorgés, mais le chef veut vous garder pour un usage plus intéressant, selon lui... m'est avis que vous auriez préféré ma proposition, mais bon... Je venais juste pour vous narguer un peu. Ce mioche qu'vous avez vu en haut a parfaitement joué son rôle, hé hé... faut pas jouer aux gentils sauveurs, hein ? Vous devriez vous dépêcher d'apprendre ça avant de mourir, "chancelier". Ça aurait pu vous servir si vous aviez été à la hauteur. Bref. D'ici à ce que l'patron revienne, vous aurez le temps d'y réfléchir."

Sur ces propos narquois, il s'en fut d'où il venait, tandis que Mornagest lui aurait volontiers écrasé la figure des poings, s'il en avait eu l'occasion.

[Lothringen]

""Les fameux conseillers?!" Si celui-là sait qui je suis, alors j'ai double raison de l'occire... Que l'implication de Manost dans cette affaire vienne à s'ébruiter, et nous aurons risqué plus que nos vies, une guerre dont les acteurs ignorent les enjeux véritables, un conflit où je n'ai pas le droit de les entraîner après moi..."
Préoccupé, il acheva de se délivrer les jambes, avant de s'attaquer aux liens de Mornagest. Les pas avaient beau s'être éteints sur le sol de pierre, ce dernier continuait de fulminer, les yeux rivés sur l'endroit où la torche avait disparu.

"Laisse-le rire. Nous ne sommes pas encore morts..."

Il avait l'impression de ne plus avoir la moindre force dans les bras, mais il parvint malgré tout, à force d'acharnement, à dénouer les cordes. Il en avait les doigts gourds, la chair râpée au sang.

Il dévisagea son compagnon. Hormi sa blessure à la tempe, il paraissait indemne, suffisamment en tout cas pour bouillonner de rage. Une épée dans les mains, il n'y paraîtrait plus.

"On dirait que je ne fais que des erreurs, s'excusa-t-il. Mais j'ai toujours mes téléportations. L'autre côté de cette grille, ça te convient ? Ou bien le couloir de tout à l'heure. Sous couvert d'invisibilité, nous pourrrons circuler un peu... Mais nous devons retrouver notre matériel. Bien que j'aie un ou deux sorts de substitution... Hors de question que je leur lègue mes haches."

[Mornagest]

Le mélandien ne répondit pas de suite. Il était bien trop bouillonnant de rage pour formuler une phrase sans exploser. Il se contenta de hocher nerveusement la tête, massant ses poignets et ses chevilles ankylosées par un séjour bloqué relativement long.

"Derrière les grilles... j'espère qu'on pourra retrouver notre équipement."

Lothringen incanta alors successivement ses sortilèges d'invisibilité puis de téléportation.

Lothringen ---> invisibilité ---> Mornagest & Lothringen

Lothringen ---> téléportation ---> Mornagest & Lothringen

Cette fois, le trajet très court empêcha Mornagest d'avoir des hauts-le-cœur désagréables. Ils pouvaient maintenant voir l'entièreté de la caverne dans laquelle ils se trouvaient, qui passait plus pour un couloir que pour une salle à proprement parler. Il n'y avait qu'une seule issue visible.

Le sol était débarrassé de poussière ; l'humidité empêchait son dépôt, et ils pouvaient marcher sans craindre de révéler leur parcours. Ils remontèrent silencieusement le tunnel naturel sans rencontrer âme qui vive. Peu de temps après, ils débouchaient sur une salle de taille importante ; les stalactites déployés le long de la voûte atteignaient une taille deux fois supérieure à Mornagest, tandis que certaines colonnes mesuraient probablement un bon demi-mètre de diamètre...

Les recoins étaient nombreux, ici, et un peu de mobilier était présent. Une table grossière sur laquelle étaient posés plusieurs gobelets en métal ou en terre cuite, quelques tabourets, et de menues armes en assez mauvais état. Mornagest fut tenté d'en ramasser une, mais il ignorait si cela ne briserait pas son invisibilité. Il chuchota la question à son compagnon.

[Lothringen]

"Pas de problèmes, tu ne redeviendras visible qu'en attaquant directement un adversaire."

Lothringen se pencha à son tour sur ces armes, pour dénicher une rapière et une dague dont la première était rouillée et la seconde émoussée du tranchant. Mouais... Toujours mieux que rien, mais la puissance des enchantements de ses haches de bataille l'avaient rendu passablement exigent. Mornagest s'étant quant à lui trouvé une épée, le semi-drow ajouta à voix basse:

"Attends, repose-la, je vais rendre cette arme un peu moins pathétique, au cas où..."

L'arme réapparut sur l'étal, à l'endroit où Mornagest venait de la lâcher.

Lothringen = = > arme magique suprême = = > épée simple en fin de carrière.

Cette dernière brilla fugitivement, avant de reprendre son aspect antérieur, plutôt piteux.

"Elle fera beaucoup plus de dégâts, comme cela. Bon, continuons..."

Et ils se remirent à remonter le tunnel, qui se poursuivait, linéaire, dans la pénombre humide où l'eau ruisselait en permanence le long des amas de calcaire.

[Mornagest]

Ledit tunnel s'acheva par une porte en bois posée sur des gonds apparemment fatigués. La crainte des courants d'air semblait être la seule motivation plausible pour ainsi barrer le chemin d'autant d'obstacle si pathétiques...

Mornagest l'examina quelques instants, avant de conclure mentalement que si c'était la seule issue possible, elle ne devait pas être fermée ni piégée ; sans quoi les fanatiques seraient blessés à chaque passage. Saisissant la poignée, le guerrier poussa lentement la porte, qui, étonnamment, ne grinça pas abominablement en répercutant dans tout l'espace sonore son désagréablement bruit de ferraille pourrie. Non, tout allait bien...

... sauf qu'ils arrivèrent sur une nouvelle salle remplie de monde. Cinq personnes se tenaient debout, face à une paroi dans laquelle une sorte d'alcôve avait été creusée. De l'endroit où ils se tenaient, ils n'avaient pas les moyens de savoir ce qu'ils regardaient, mais c'était très vraisemblablement un autel, à en juger par les accessoires divers qui entouraient les fanatiques présents ; bougies en cire noire, table en bois couverte d'un napperon sinistrement décoré de motifs rouge sombre, multiples parchemins déroulés sur ladite table...

Personne ne faisait attention à eux. Ils semblaient comme pris dans un genre de transe religieuse, à moins que ce ne fut le résultat d'une solide prise de drogue. L'un des fanatiques arborait à la taille l'épée du mélandien.